lundi 21 décembre 2015

"Adieu petit tailleur"


Texte rédigé par Lorena Göritz (Allemagne) dans le cadre du cours LFRAN1401
Il s’était levé brusquement, excédé, à trois heures du matin, s’était rhabillé, avait failli sortir sans cravate, en pantoufles, le col du pardessus relevé, comme certaines gens qui promènent leur chien le soir ou le matin de bonne heure. Puis, une fois dans la cour de cette maison qu’il ne parvenait pas, après deux mois, à considérer comme une vraie maison, il s’était aperçu, en levant machinalement la tête, qu’il avait oublié d’éteindre sa lumière, mais il n’avait pas eu le courage de remonter…

…C’était la troisième fois cette semaine que François quittait son atelier « Petit tailleur » sans avoir une idée créative. Ce n’était pas étonnant. Cela faisait deux mois maintenant que sa femme l’avait trompé. Pendant toutes ces années sa femme avait été sa seule source d’inspiration, la raison principale pour laquelle il avait quitté la Belgique.
Ce n’était pas qu’il n’aimait pas la France, c’est juste que c’était toujours sa femme qui lui avait donné de la vitalité. Mais il avait perdu le gout de vivre le jour où il l’avait vue avec un autre homme, un client de leur atelier collectif, dans le vestiaire du « Petit tailleur ».
Quand il arriva à son appartement, Maigret, le commissaire, fut la première personne qu’il a vue, suivie de son assistant.
« Bonsoir Monsieur Dutour. Nous avons des questions à propos de votre soirée de lundi passé » dit Maigret.
François savait déjà que cela signifiait la fin de sa vie. « Bien sûr, entrez » dit François avec malaise.
« Je suis désolé de vous le dire, mais soit vous refusez de coopérer et vous risquez la peine maximale, soit vous avouez et votre peine sera plus faible » dit Maigret d’une voix déterminée et stricte.
François ne pourrait pas vivre avec ce secret. Il savait qu’il devait raconter toute l’histoire maintenant et il commença à pleurer.
« Ce n’est pas ma faute. C’est ma femme qui a détruit ma vie. C’est elle qui m’a trompé pendant des mois. » François fit un pause. « C’était la deuxième fois que j’avais vu ma femme avec cet homme dans le « Petit tailleur », le centre de ma vie. J’ai totalement perdu le contrôle et puis j’ai pris les ciseaux… »
« … et vous les avez attaqués » continua Maigret.
« Pourquoi est-ce qu’elle m’a fait du mal, pourquoi ? » gémissait François.
Pour Maigret, c’était évident. Monsieur Dutour avait tué sa femme après avoir tué l’amant de sa femme. On les avait trouvés tous les deux morts. L’un d’un coup de couteau dans le dos, l’autre suite à l’attaque aux ciseaux. Les actes de jalousie sont les plus cruels.
« Monsieur Dutour, vous comprenez que nous devons vous arrêter. Les collègues policiers vont fermer le « Petit tailleur » pour un temps indéterminé. »
Maigret lui passa les menottes tout en traversant le « Petit tailleur ».
«Adieu, petit tailleur…». Et ils fermèrent les portes à clef en s’en allant.