samedi 10 novembre 2018

A la manière de Georges Simenon...


Il s’était levé brusquement, excédé, à trois heures du matin, s’était rhabillé, avait failli sortir sans cravate, en pantoufles, le col du pardessus relevé, comme certains gens qui promènent leur chien le soir ou le matin de bonne heure. Puis, une fois dans la cour de cette maison qu'il ne parvenait pas, après deux mois, à considérer comme une vraie maison, il s'était aperçu, en levant machinalement la tête, qu'il avait oublié d'éteindre sa lumière, mais il n'avait pas eu le courage de remonter. (Georges Simenon, premières lignes de Trois chambres à Manhattan).

Madame Widow l’avait appelé sur le téléphone pour une urgence dans sa maison, elle avait bafouillé quelque chose à propos d’un tailleur. Ce n’était pas la première fois que Franz se levait au milieu de la nuit pour se précipiter chez Madame Widow, depuis qu’il avait déménagé dans cette ville, il était devenu l’ami le plus proche de la pauvre veuve. Elle habitait tout seule dans une ancienne et lugubre maison, parfois pendant la nuit elle était réveillée par un bruit sinistre, mais la plupart du temps s’agissait de ses chats ou le craquement de ses vieux meubles. Donc, cette nuit-là Franz n’avait pas demandé trop d’explication et à moitié endormi, il avait marché jusqu’à la maison de son amie.

Quand il arriva devant la maison de Mme Widow, étant donné l’heure, il frappa à la porte discrètement, mais aucun signe d’elle, il attendit quelques seconds et puis frappa avec plus de vigueur…toujours rien. La lumière de la salle à manger était allumée « peut-être que quelque chose est passé, je vais jeter un œil » , pensa-t-il pensa pendant que il essayait de trouver le moyen d’entrer. Heureusement, la fenêtre était un peu ouverte, juste assez pour lui permettre d’entrer dans la maison sans trop d’effort. 

« Madame Widow », chuchota-t-il dans la grande salle à manger faiblement éclairée «Tout va bien ? Je me suis permis d’entrer, Madame ? ». Juste après ses mots, un petit bruit qui venait de la cuisine effraya Franz, lequel eut l’impression d’avoir vu une ombre suspecte. Alors, il prit sur la cheminée une statue en bronze qui représentait un grand chat et, courageusement, il s’apprêta à traverser la salle. 

Mais après le deuxième pas, son pied gauche fut arrêté par quelque chose qu’était sur le sol : la main de Mme, laquelle était couchée sur le dos avec la tête écrasée dans un bain de sang. Franz avait plusieurs fois fait preuve de courage, mais s’il y a une chose qu’il ne supportait pas c’est le sang. Donc, le pauvre Franz s’est évanouit en un rien de temps.
Après quelques minutes, la police arriva devant la porte de Madame, un voisin avait appelé le commissariat parce qu’il avait vu quelqu’un s’introduire par la fenêtre. Le commissaire entra pendant que Franz se réveillait, en entendant des voix, ce dernier se leva, toujours avec le chat en bronze dans sa main droite.    
     
   Il était debout pétrifié, à côté du cadavre de Mme et dans sa main la potentielle arme du crime. Les circonstances donnaient à penser qu’il avait assassiné la pauvre veuve cette nuit-là. 

L’incrédule Franz fut immédiatement arrêté et amené au commissariat de police, où il fut interrogé par les policiers. De la version de l’histoire de Franz, un particulier avait attiré l’attention du commissaire : le tailleur. En autres circonstances il aurait pensé à une tentative de blâmer quelqu’un d’autre, mais cette fois il sentait que le suspect était sincère.  Tout de suite après l’interrogatoire, le commissaire alla faire une autre inspection sur le lieu du crime. Le corps sans vie de la propriétaire était encore dans la maison. Quand le commissaire entra dans la salle à manger, ses yeux remarquèrent des grandes toiles d’araignée sur le plafond « on dirait des magnifique tissus » pensa le commissaire, et enfin tout devint clair dans sa tête. 

« Dubuisson, appelle une entreprise de désinfestation s’il vous plait », Dubuisson, le collaborateur du commissaire, ne comprenait pas cette requête, « Regardez sa main gauche, vous voyez cette morsure ? Elle a été mordue par une araignée très dangereuse, mais seulement le mâle est toxique. Après la morsure elle s’est évanouie et s’est cogné la tête sur le bord de la cheminée. »      

Dubuisson continuait de regarder son patron comme s’il écoutait un fou.
« Je ne vous ai pas convaincus, n’est-ce pas? Levez les yeux, vous voyez cette magnifique toile ? Et bien, dites bonjour à monsieur le tailleur, l’araignée tailleur qui a tué la veuve. » le commissaire indiqua une grande araignée noire sur le mur de la salle.
 « Et maintenant, à moins que vous ne vouliez finir comme Madame Widow, il faudrait sortir vite. »
« Adieu, petit tailleur... »
Et ils fermèrent les portes à clef en s'en allant.
 (Georges Simenon, dernière lignes de Trois chambres à Manhattan)


 Fabio Castaldi, Italie,  (objectif niveau B2)



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