Il s’était levé brusquement, excédé, à trois
heures du matin, s’était rhabillé, avait failli sortir sans cravate, en
pantoufles, le col du pardessus relevé, comme certains gens qui promènent leur
chien le soir ou le matin de bonne heure. Puis, une fois dans la cour de cette
maison qu'il ne parvenait pas, après deux mois, à considérer comme une vraie
maison, il s'était aperçu, en levant machinalement la tête, qu'il avait oublié
d'éteindre sa lumière, mais il n'avait pas eu le courage de remonter. (Georges
Simenon, premières lignes de Trois chambres à Manhattan).
Madame Widow l’avait appelé sur le téléphone
pour une urgence dans sa maison, elle avait bafouillé quelque chose à propos
d’un tailleur. Ce n’était pas la première fois que Franz se levait au milieu de
la nuit pour se précipiter chez Madame Widow, depuis qu’il avait déménagé dans
cette ville, il était devenu l’ami le plus proche de la pauvre veuve. Elle
habitait tout seule dans une ancienne et lugubre maison, parfois pendant la
nuit elle était réveillée par un bruit sinistre, mais la plupart du temps
s’agissait de ses chats ou le craquement de ses vieux meubles. Donc, cette nuit-là
Franz n’avait pas demandé trop d’explication et à moitié endormi, il avait
marché jusqu’à la maison de son amie.
Quand il arriva devant la maison de Mme Widow,
étant donné l’heure, il frappa à la porte discrètement, mais aucun signe
d’elle, il attendit quelques seconds et puis frappa avec plus de
vigueur…toujours rien. La lumière de la salle à manger était allumée « peut-être
que quelque chose est passé, je vais jeter un œil » , pensa-t-il pensa
pendant que il essayait de trouver le moyen d’entrer. Heureusement, la fenêtre était
un peu ouverte, juste assez pour lui permettre d’entrer dans la maison sans
trop d’effort.
« Madame
Widow », chuchota-t-il dans la grande salle à manger faiblement
éclairée «Tout va bien ? Je me suis
permis d’entrer, Madame ? ». Juste après ses mots, un petit bruit
qui venait de la cuisine effraya Franz, lequel eut l’impression d’avoir vu une
ombre suspecte. Alors, il prit sur la cheminée une statue en bronze qui représentait
un grand chat et, courageusement, il s’apprêta à traverser la salle.
Mais après le deuxième pas, son pied gauche fut
arrêté par quelque chose qu’était sur le sol : la main de Mme, laquelle était
couchée sur le dos avec la tête écrasée dans un bain de sang. Franz avait
plusieurs fois fait preuve de courage, mais s’il y a une chose qu’il ne
supportait pas c’est le sang. Donc, le pauvre Franz s’est évanouit en un rien
de temps.
Après quelques minutes, la police arriva devant
la porte de Madame, un voisin avait appelé le commissariat parce qu’il avait vu
quelqu’un s’introduire par la fenêtre. Le commissaire entra pendant que Franz se réveillait, en entendant des voix,
ce dernier se leva, toujours avec le chat en bronze dans sa main droite.
Il était debout pétrifié, à côté
du cadavre de Mme et dans sa main la potentielle arme du crime. Les
circonstances donnaient à penser qu’il avait assassiné la pauvre veuve cette
nuit-là.
L’incrédule Franz fut immédiatement arrêté et amené au commissariat de
police, où il fut interrogé par les policiers. De la version de l’histoire de
Franz, un particulier avait attiré l’attention du commissaire : le
tailleur. En autres circonstances il aurait pensé à une tentative de blâmer
quelqu’un d’autre, mais cette fois il sentait que le suspect était
sincère. Tout de suite après
l’interrogatoire, le commissaire alla faire une autre inspection sur le lieu du
crime. Le corps sans vie de la propriétaire était encore dans la maison. Quand
le commissaire entra dans la salle à manger, ses yeux remarquèrent des grandes
toiles d’araignée sur le plafond « on dirait des magnifique tissus »
pensa le commissaire, et enfin tout devint clair dans sa tête.
« Dubuisson, appelle une
entreprise de désinfestation s’il vous plait », Dubuisson, le
collaborateur du commissaire, ne comprenait pas cette requête, « Regardez sa main gauche, vous voyez cette
morsure ? Elle a été mordue par une araignée très dangereuse, mais
seulement le mâle est toxique. Après la morsure elle s’est évanouie et s’est
cogné la tête sur le bord de la cheminée. »
Dubuisson continuait de regarder son patron comme s’il écoutait un fou.
« Je ne vous ai pas convaincus,
n’est-ce pas? Levez les yeux, vous voyez cette magnifique toile ? Et bien,
dites bonjour à monsieur le tailleur, l’araignée tailleur qui a tué la veuve. »
le commissaire indiqua une grande araignée noire sur le mur de la salle.
« Et maintenant, à moins
que vous ne vouliez finir comme Madame Widow, il faudrait sortir vite. »
« Adieu, petit tailleur... »
Et ils fermèrent les portes à clef en s'en allant.
(Georges Simenon,
dernière lignes de Trois chambres à Manhattan)
Fabio Castaldi, Italie, (objectif niveau B2)
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